Côte d’Ivoire / Mesures de biosécurité en élevage avicole dans le district des Montagnes / Commune de Man

1 924

Le département de Man est le Chef-lieu de la région du Tonkpi à l’ouest de la Cote d’Ivoire.  Elle a une population de 388 448 habitants dont 233 532 habitants au niveau de la commune en majorité rurale et à vocation agricole. Le climat de type Baouléen de régime équatorial caractérisé par deux saisons sèches (une grande saison sèche de novembre à mars et une petite saison sèche de juillet à fin août) et deux saisons de pluie (une grande saison de pluie de mars à juin et une petite saison de pluie de septembre à octobre). Le relief est relativement monotone avec la présence de collines disséminées, de nombreux bas-fonds ayant des sols ferralitiques de sature et des sols hydromorphes. L’objectif général de la présente enquête est de montrer les mesures de biosécurité appliquées en élevage avicole dans la commune de Man.

La filière avicole ivoirienne est la plus performante de la sous-région et représente un chiffre d’affaires annuel de 40 milliards de francs CFA et offre 10 000 emplois permanents. La production de viande de volailles et des œufs de consommation est respectivement de 10 000 tonnes et de 600 millions d’unités en 2007 selon Dr Dje K. Malheureusement, la grippe aviaire qui est une épizootie a été notifiée le 28 mai 2015 par la Direction des Services Vétérinaires de Côte d’Ivoire à l’Office International des Epizooties (O.I.E, 2015). Les effets néfastes sur le commerce et l’économie sont aussi considérables que la psychose qu’elle entretient dans l’esprit de nos citoyens. Dès lors, il est urgent d’éradiquer cette pandémie qui passe nécessairement par la sensibilisation de la population. Dans cette optique, il est urgent de renforcer les mesures de biosécurité autour des élevages modernes de volailles, des marchés à volaille et des aires d’abattage à volaille.

ECHANTILLONNAGE

Sur un ensemble de 80 élevages modernes, nous avons retenus 25 par tirage au sort. Ce qui représente un taux de 31,25 % des élevages en activité. Les élevages sont du type traditionnel, semi-intensif et intensif. Nous avons tenu compte également de la disponibilité des éleveurs à participer à notre enquête. Les élevages choisis comprennent 10 grands élevages (plus de 1000 têtes) et 15 petits élevages (moins de 1000 têtes).

COLLECTE DES DONNEES

Cependant, nous avons soumis un questionnaire à chaque éleveur de volaille afin de déterminer le niveau d’application des mesures de biosécurité dans les fermes.

Elle a permis de faire l’état des lieux, tout en recueillant les informations sur la base du questionnaire. Relativement à la biosécurité, il fallait mettre l’accent sur les trois composantes principales et indispensables à l’évaluation de la biosécurité en élevage notamment, l’isolement, le contrôle des mouvements et l’assainissement.

 

RESULTATS DE L’ISOLEMENT

En effet, l’isolement concerne les fermes clôturées, les grillages de protection, les portes des bâtiments qui doivent être fermées, les pédiluves fonctionnels devant les bâtiments et les entrées des fermes en (Tableau). Il se trouve que sur les 25 fermes, 7 d’entre elles sont clôturées mais ne possèdent pas de pédiluve à l’entrée. Il existe un grillage de protection contre les nuisibles au niveau de toutes les fermes visitées (Figure 1). Cependant, 88% des bâtiments d’élevage disposent de pédiluves non fonctionnels (figure 2).

 

Tableau I : Principales composantes de l’isolement des fermes

Isolement Nombre de fermes Taux représentatif des fermes en %
Fermes clôturées 7 28
Grillages de protection 25 100
Porte de bâtiment fermée 25 100
Pédiluve à chaque entrée des bâtiments 22 88
Pédiluve fonctionnel 0 0
Pédiluve à l’entrée de la ferme 0 0
 

 

 

   

 

Figure 1 : Présence de grillage de protection contre les nuisibles

 

Figure 2 : Bâtiment avec pédiluve non fonctionnel

 

CONTROLE DES MOUVEMENTS

Aucune ferme ne réglemente les visites, possède des registres de visite, et confectionne les vêtements aux visiteurs pour le contrôle des mouvements à l’intérieur. Concernant le port de tenue et de chaussure spéciale pour les travailleurs, il n’y a qu’une (1) seule ferme qui la respecte. Seulement 48% des éleveurs assurent la livraison des produits de l’élevage (œufs et poulets de chair) aux commerçants de volailles (Tableau II).

Pour contrôler les mouvements à l’extérieur de la ferme, Aucune ferme ne possède de panneau interdisant l’entrée des personnes ou le stationnement des véhicules à proximité des fermes. S’agissant de la récupération des produits d’élevage sur la ferme (poulets et œufs), 52% des éleveurs sollicitent les services des commerçants grossistes et détaillants (Tableau III).

 

Tableau II : contrôle des mouvements à l’intérieur de la ferme

Contrôle des mouvements Nombre de fermes Taux représentatif des fermes en %
Visites réglementées 0 0
Registre des visites 0 0
Port d’équipement et de vêtement lors des visites 0 0
Travailleurs assignés à des bâtiments 5 20
Livraison des produits par l’éleveur (poulets et œufs) 12 48
Tenues et chaussures spéciale pour les travailleurs 1 4
Zone d’accès contrôlé (ZAC) 0 0
Zone d’accès restreinte (ZAR) 0 0

 

 

Tableau III : contrôle des mouvements à l’extérieur de la ferme

Contrôle des mouvements Nombre de fermes Taux représentatif des fermes en %
Panneau d’interdiction d’entrée 0 0
Accès interdit pour les visiteurs 0 0
Approvisionnement en aliments par les éleveurs 25 100
Approvisionnement en poussins par les éleveurs 25 100
Panneau d’interdiction de stationnement des véhicules 0 0
Récupération des produits par les commerçants 13 52

 

ASSAINISSEMENT

Le nettoyage du poulailler consiste à enlever la litière sale qui sera utilisée comme fumier dans le cadre de la production végétale. Mais, les lieux de stockage sont différents d’une ferme à l’autre. Ainsi, 72 % des éleveurs exposent la litière dans la cours de la ferme (Figure 3) et 28 % des fermes à l’extérieur de la clôture (Figure 4).

Les modes d’élimination des sujets morts au niveau des élevages avicoles diffèrent d’une ferme à l’autre. Il se trouve que 88% des éleveurs consomment les sujets morts, 8 % font de l’enfouissement et 4 % les jettent dans la nature.

Figure 3 : litière sale dans la cour d’une ferme avicole

Figure 4 : litière sale exposée derrière la clôture

 

DISCUSSION

L’activité est confrontée à des problèmes d’organisation dans la filière avicole dont le problème majeur est la mauvaise pratique de la biosécurité dans les différents sites d’élevage.

Concernant l’isolement, la présence d’une clôture est essentielle dans une ferme avicole. Il existe 72 % des fermes qui n’ont pas de clôture. Cependant, elles disposent des grillages de protection et gardent les portes des poulaillers bien fermées. Cela a été souligné par Kaboret (2007) en insistant sur l’importance de garder les portes des poulaillers bien fermés pour éviter l’intrusion des ennemis de volailles (serpents, fourmis, etc..) et également des germes pathogènes dans le bâtiment d’élevage. Il existe des volailles telles que les canards et les dindons qui ne sont pas éloignées des bâtiments de poulets de chair ou de pondeuses (FAO, 2008). Signalons que les panneaux d’interdiction d’entrée des visiteurs ou de stationnement des véhicules n’existent pas sur les fermes avicoles. Ce qui constitue une insuffisance en matière de biosécurité.  En plus, 52% des éleveurs acceptent les revendeurs de volailles sur les fermes contre 48% des éleveurs livrant les produits d’élevage sur le marché. Cela constitue un gros risque d’introduction de maladies dans la ferme.

Au niveau de l’assainissement, le nettoyage, la désinfection des poulaillers, des mangeoires et abreuvoirs sont bien pratiqués par les éleveurs après chaque bande.

Il y a une grande négligence des éleveurs au niveau de la biosécurité liée à la gestion des déchets, en particulier la litière sale. Il est recommandé le compostage des litières, hors des fermes, avant leur emploi comme engrais organique (FAO, 2008).

Pour la destruction des volailles mortes, 88% des éleveurs les consomment contre 8% des éleveurs qui les enfouissent et 4 % les jetant dans la nature. L’accessibilité des fermes par les oiseaux sauvages ou migrateurs, la présence des sujets morts et jetés à proximité des bâtiments d’élevage sont contraires aux bonnes pratiques de la biosécurité en élevage avicole moderne (Kaboret, 2007).

 

En somme, les autorités ivoiriennes ont pris des dispositions en vue d’améliorer les mesures de biosécurité à travers la sensibilisation et la formation des acteurs de la filière avicole en groupement de défense sécuritaire. Cela a fait suite à la présence de la grippe aviaire en Côte d’Ivoire. Malheureusement, la mauvaise pratique de la biosécurité dans les différents sites d’élevage est la conséquence des problèmes d’organisation de la filière avicole dans la commune de Man.

Au niveau de l’assainissement, le nettoyage et la désinfection des poulaillers, des mangeoires et abreuvoirs, sont bien pratiqués par les éleveurs dans le cadre du vide sanitaire. Cependant, 88% des éleveurs consomment les sujets morts contre 8% des éleveurs qui les enfouissent et 4 % les jetant dans la nature. Il est important de faire comprendre aux acteurs de la filière avicole que la biosécurité est actuellement le moyen efficace et moins coûteux pour lutter contre toutes les pathologies émergentes.

 

Moussa Camara